dimanche 2 septembre 2012

CROIRE VRAIMENT

Prions en Église - Editorial du mois de septembre 2012

Croire vraiment

Ce mois-ci, les activités paroissiales reprennent au seuil d’une année qui deviendra, dès le 11 octobre, l’Année de la foi. On reparlera de cette année, mais il est déjà permis de se demander quel rôle la foi joue dans l’engagement des communautés chrétiennes.
J’oserais dire au départ que le simple fait de croire n’est pas ce qui distingue les croyants des incroyants. Parce que la condition humaine est telle qu’on oscille tout le temps entre la foi et le doute. Dans une interview qu’il a accordée sur ce sujet, l’humoriste Raymond Devos raconte ce vertige à peu près en ces termes: «Si je vais dire à mon curé que je viens de voir Dieu, il m’invitera à me reposer un peu; puis il emmènera ma femme dans la pièce d’à côté pour lui dire: ‘Occupez-vous de Raymond: il ne semble pas aller bien, il dit des choses bizarres!’» Mais d’un autre côté, continue Devos, même les gens qui ne croient pas en Dieu tombent un jour ou l’autre à genoux dans un moment de détresse, pour implorer quelqu’un, qui doit bien être Dieu. La condition humaine est terrible, elle laisse notre réflexion sans réponse par rapport aux grandes questions de l’existence: d’où venons-nous, où allons-nous après la mort, Dieu existe-t-il…?
Qu’est-ce qui distingue alors un homme ou une femme de foi d’un incroyant? Ce n’est certainement pas d’avoir une idée claire et toute faite sur Dieu, sur ses interventions, sur ce qui est bien et ce qui est mal à ses yeux, sur ce qu’il faut croire et ce qui est contraire à la foi. Il faut l’admettre, une certitude de foi trop intransigeante est le symptôme d’un manque de foi. Car la foi est littéralement un combat perpétuel. Elle est, selon l’expérience de Georges Bernanos, «vingt-quatre heures de doute moins une minute d’espérance».
Ce qui me semble caractériser la vraie foi, la foi chrétienne authentique, ne se trouve pas ailleurs que dans l’attachement au Christ. Pour traverser l’abîme de la mer sans y sombrer, conseille saint Augustin, «ne saute pas hors du vaisseau du Christ (…). Attache-toi au Christ». Autrement dit, croire, ce n’est pas vouloir croire à tout prix. C’est plutôt avoir le courage de vivre et de s’engager dans la terrible opacité de la condition humaine en faisant confiance au bois qu’est le vaisseau, c’est-à-dire au bois de la croix qui bourgeonne déjà en arbre de vie.
Jacques Lison